27 janvier 2013

VERTICAL

J’ai pris mon verre et je me suis mis à regarder le ciel, seul au bord de cette fenêtre mal éclairée. Il était tard, peut-être pas, on y voyait vraiment rien mais j’essayais de peindre la nuit avec mes yeux. J’avais passé la soirée à dire des trucs surement inintéressants, à parler de moi, à être sérieux, à prendre un air grave et concentré comme si j’étais venu pour un entretien d’embauche.
A dire de la merde, à mettre dans mon nez dans mon propre caca en en redemandant encore. A m’éloigner.

Je me sentais globalement humilié comme souvent et je ne savais pas trop quoi faire, comme toujours.

Un peu gêné, je faisais semblant de ne pas voir qu’on était cinq et que quatre étaient en train de se tripoter dans mon dos. Dont deux qui n’auraient pas dû. Quel naïf. Quelle tristesse. Ils me peinaient et même temps m’intéressaient. Je les méprisais tout autant que je les enviais. J’aurais voulu être comme eux, désirés, haïs, aimés, pouvoir transgresser ce sentiment avec quelqu’un qui en aurait fait de même. Ça m’aurait excité, ça m’aurait donné la sensation d’aller au-delà, de braver l’interdit, de faire des doigts à tous ces coincés du cul, de vivre.

J’en aurais été bien incapable.

J’avais mélangé, tout ce que j’avais eu sous la main, je ne me rendais pas compte que c’était aussi le cas dans mon crâne et que je ne tarderais pas à m’accrocher définitivement aux murs. Je commençais à avoir des visions de catch américain vu sur une mauvaise chaine de la TNT et là je me suis vraiment vu partir. J’ai passé ma main glacée sur mon frond, je me suis enfoncé le doigt dans l’œil, j’ai plié les jambes sous la douleur avant de me taper la tête contre mes genoux. J’aurais pu me sectionner une artère qu’on ne s’en serait pas aperçu.

Finalement j’ai trainé ma veste, pris quelques photos, me suis dirigé vers la porte avant de me retourner pour bien enregistrer la scène devant moi. Je me suis dit que je resterais éternellement spectateur puis je suis parti.
La cage d’escalier, comme la nuit, était étrangement silencieuse, on aurait dit que quelqu’un avait oublié de brancher le son quelque part. Ça m’a donné le cafard.

Je suis rentré. Quelqu’un dormait déjà et je l’ai laissée m’insulter pour qu’elle me fasse de la place. J’aurais aimé lui vomir dessus mais ça n'aurait pas eu plus d'effet qu'un texte lu et oublié le lendemain.