30 janvier 2010

UN

Elle est là et elle me parle comme si elle n’avait vu personne depuis des semaines. Le vin est douteux, le café encore plus mais cela lui semble bien égal du moment qu’elle puisse faire régulièrement sortir des sons intelligibles de sa bouche.
Je suis là, je l’écoute, les bras ballants, l’esprit vide, le regard ailleurs, la fierté quelque part, et plus le temps passe et plus je renonce à toute envie de m’exprimer. Sa logorrhée, diablement efficace, a fini par méthodiquement annihiler mes dernières tentatives de révolte. Mon cerveau n’a plus la force de l’interpeller, pas même de l’écouter, tout juste de s’évader.

Je la regarde du fond des yeux, aussi intensément qu’il puisse être, et je lutte désespérément pour ne pas me noyer dans ce bleu d’une profondeur abyssale. J’aurais pu me perdre dans son iris qu’elle ne m’aurait pas remarqué. J’aurais pu lui dire que je l’aimais, que je crevais d’envie de l’embrasser délicatement en lui passant lentement ma main dans ses cheveux, qu’elle ne m’aurait pas écouté.

J’étais son déversoir, sa distraction du soir, son récepteur à histoire, peut être même son défouloir.
Son bon vouloir.

J’aurais tout fait pour l’avoir.

29 janvier 2010

INSTANT

Elle est là, et elle veut un gosse.
Et moi je suis si fiévreux que mes spermatozoïdes doivent être déjà morts avant de sortir de ma queue.

25 janvier 2010

EN VRAC...

Tout ce qui suit, ce ne sont que quelques lignes jetées au hasard par un petit con sur un doc word une nuit d’hiver.
Comme la plupart des gens, je n’ai baigné dans aucun mouvement artistique. Je suis un inculte de naissance. Je ne connais pas la musique, je ne sais pas dessiner, ni danser. Mais je connais les mots et l’art de les dire. Alors je vais essayer de les écrire.

1

Des fois, je me dis qu’il y a quelque chose qui a dû bugué quelque part. J’habite un des plus beaux endroits de Paris et je gagne pas une thune. Je suis en quelque sorte une erreur de la banque en votre faveur qui serait passée à la trappe, un gars à qui on aurait refilé la mauvaise clef sans s’en apercevoir, un mendiant qui boufferait à l’œil tous les jours au Ritz . C’est pas possible, un jour je vais me réveiller de ce rêve étrange et me retrouver chez mes parents à la veille du Bac.
Mais non je suis là, je me ballade dans la rue tranquillement, et je sens qu’un monde me sépare de tous ces gens. J’ai l’impression d’être tout à fait distant. D’y être, sans y être réellement.

Pour ceux qui n’ont pas le choix, Paris peut être la plus affreuse chose qui soit. Paris peut broyer les âmes et les vider de leur substance. Elle rassemble toute la misère de France. On le sait, c’est écrit, placardé avant qu’on y entre.
Quand on vient de province on sait à quoi s’attendre, alors on prend ses précautions. Mais ce qu’on sait moins, pour ceux qui sont du bon côté, les petits malins qui pensaient y être suffisamment préparés, c’est que Paris peut aussi agir comme un piège qui se referme lentement mais surement. Plus le temps passe et plus on oublie comment on en sort. On oublie même qu’on n’y a pas toujours vécu.
Un piège bien vicieux, qui vous tient bien serré, qui ne veut plus vous lâcher.

Pour l’instant ce piège a la forme d’une collocation bien organisée où j’évolue entre un trentenaire exalté et une jeune belge un peu coincée. L’un passe ses journées à bosser quand l’autre alterne cours de droit et séances d’UV. Tous les deux sont plutôt cools dans leur genre, souriants, faciles d’accès, disponibles pour discuter, prêts à aider. Parfois parfaits. On a l'air de s’entendre et on en est les premiers étonnés. Mais tous les deux ont aussi une arme infaillible pour me faire chier : s'envoyer en l'air quand je suis dans la pièce à côté.

Y’a pas à dire, ça peut lasser.

2

Hier j’ai définitivement arrêté la cigarette, sans jamais vraiment l’avoir commencée.
Faut dire qu’à la base je ne suis pas un fumeur, j’étais même un vrai sportif en mon temps. Celui qui fait rêver les ménagères, un esprit sain dans un corps sain qu'ils disent. Bosseur, appliqué, voir attentionné. Moyennement doué mais raison de plus pour persévérer.

Aussi loin que je m'en souvienne, j’ai toujours joué au foot. Jeune et encore plus con, je ne manquais presque aucun entraînement.
Le club où j’allais était tenu par des vrais bras cassés mais mon sérieux était apprécié par rapport à ceux qui venaient surtout pour déconner. On se débrouillait quand même correctement et les années où l'entraîneur était de qualité on pouvait même se targuer de pas être mauvais.

Je me souviens de ce coach que j’ai eu dans les dernières années.
La cinquantaine bien tassée, aimable, un peu particulier, mais un vrai passionné. Le gars ne payait pas de mine avec sa vieille Polo déglinguée et son survet troué. Mais le gars, entrainer, c’était sa seule passion en dehors de son métier. Ses entraînements ressemblaient d’ailleurs plus à des sessions de professionnels qu’à ceux d’une petite équipe de district.
Au début, ça nous faisait doucement rigoler ses prises de poux, sa bouteille d’eau qu’on devait s’enfiler avant chaque match et autres manies à adopter mais faut dire qu'avec lui on avait jamais aussi bien joué. Et on a plus jamais aussi bien joué.

Un jour, un mec venu de nulle part, un pote du président je crois, a débarqué et voulait tout diriger. « Manager sportif » qu’il s’était nommé. Il a décidé que désormais ce serait lui qui nous entraînerait et a jeté notre entraîneur comme on jette à la poubelle les affaires laissées là par les anciens locataires quand on emménage dans un nouvel appart.

Moi comme tous les autres, j’avais fermé ma gueule, ou plutôt vainement tenté de l’ouvrir, je manquais de charisme et surtout de bonne volonté. J’avais préféré regarder à côté.

De toute façon l’année d’après je partais alors je m’en foutais.

Mais je reviens à la cigarette. Justement à 20 ans passés, sur le tard, que je l'ai essayée. Une fois que je m’ennuyais entre deux cours mal casés, je m’en étais fourré une dans la bouche et dans le reflet de cette vitre trop sale j’avais trouvé que ça avait quand même de la gueule, ce petit côté James Dean.
A partir de ce jour là je m’étais fixé pour objectif de devenir un fumeur, un vrai. Mais à ma façon. J’avais décrété que mes cigarettes devaient être entièrement blanches, comme dans les films des années 50, comme dans le passé. Après avoir passé en revu presque toutes les marques existantes, mon choix s’était porté sur les Davidoffs qui, plus longues, faisaient d’autant plus raffinées.
Face au miroir de la salle de bain j’avais épuisé presque toutes les mimiques possibles et imaginables et à force j’en avais trouvé une qui me convenait à peu près. J’étais fin près. J’avais décidé de fumer comme on commence un régime bio, avant tout pour l’apparence. Dans les deux cas, les mauvaises causes entraînent généralement les mauvaises conséquences.
Avec ma cigarette péniblement allumée et mon assurance mal assurée, j’avais plus l’air d’un premier de la classe surpris en train de fumer dans les chiottes du lycée que d’un Gainsbarre en puissance. Je le savais mais néanmoins je persévérai, enfin jusqu’à ce qu’un jour je finisse par reprendre le sport là où je l’avais laissé.

J’ai donc aussi facilement arrêté que j’avais difficilement commencé. Faut dire qu’à 2 cigarettes par jour, il en aurait fallu plus pour s’accommoder.

J’ai donc repris le sport, mais je ne me souviens plus très bien pourquoi. J’avais dû laisser parler mon instinct. Enfin je crois.
En cette période de fausse recherche d’emploi, au lieu de passer son temps à se branler, ou accessoirement à écrire, autant soigner les apparences. L’inactivité dérange qui parait, à ce qu'on dit.

Une salle de gym parisienne, on s’en tire pas à moins de 500€ l’année. Alors quand on décide de s’y inscrire on a intérêt d’y aller. Surtout quand on a pas le fric pour se la payer.

A l’intérieur, le monde se divise en deux catégories : ceux qui tentent de prendre du poids et ceux qui veulent à tout prix en perdre.
Les premiers cités font un aller direct vers les machines à gonflette, on les repère à leur silhouette, qui me ferait plutôt penser à celle d’un beauf : plutôt râblais, le coup épais, les cheveux rasés, des muscles saillants sous un t-shirt trop court, un tatouage tribal. La panoplie du parfait mâle. Quand ils ont chargé la mule au maximum, on les entend faire de petits bruits rauques, semblables à ceux d’un acteur porno en train de jouir. Parfois les yeux leurs sortent même littéralement des orbites tellement ils semblent forcer, mais ça a plutôt l’air de porter ses fruits puisqu’ils ont autant de muscles que je n’en aurai jamais. Ce qui ne les empêche pas de passer leur temps à se mater dans le miroir pour être sûr que tout s'est pas barré. 25 – 30 ans c’est souvent leur âge, après je ne pourrais pas dire pas dire pour leur métier, mais tout ce que je peux voir, c’est qu’ils sont là à 17h tous les soirs.
L’autre catégorie regroupe surtout les nanas qui se trouvent toujours trop grosses. On les retrouve essentiellement sur les appareils de type cardio (tapis roulants, vélos, steppers). Elles peuvent y rester des heures entières sur un rythme léger, un bouquin à la main, ou des écouteurs d’Ipod Shuffle coincés dans les oreilles, intégralement coupées du monde extérieur, totalement hermétiques à toute tentative fortuite de communication. D’ailleurs ça peut se comprendre elles ne sont pas là pour ça, mais elles sont quand même pas mal de leur genre ; les gros musclés eux prennent au moins le temps de discuter, et même de se marrer, alors qu’elles on a l’impression qu’elles font leur séance comme elles prennent les transports en commun. Ebauches fidèles de la cadre trentenaire prenant soin de soi, elles y sont en même temps obligées dans une période où, si ce n’est pas déjà fait, leur horloge biologique leur rappelle chaque matin qu’il faudrait qu’elles se trouvent quelqu’un pour se faire faire un gamin.
Et puis il y a le reste, tout cette masse inerte qui n’est ni l’un ni l’autre, ou peut être les deux à la fois. Qui tente de faire travailler aussi bien son cœur que ses muscles, qui utilise toutes les machines de la salle car après tout elles sont faites pour ça. Ils sont là, ces soldats de l’ordinaire, tiraillés entre deux groupes, deux univers, et semblent des étrangers aussi bien pour l’un que pour l’autre.
Moi, avec mes 60 kg tous mouillés et ma barbe mal rasée, je suis trop gringalet pour ces messieurs gonflés, et trop testostéroné pour ces demoiselles élancées.

Dans les deux cas, je ne suis pas assez épilé.

3

Là maintenant je voudrais vous parler plus longuement de mon enfance mais mes souvenirs, bien que récents, s’amusent à se jouer de moi. J’ai la mémoire jeune mais sélective alors il m’arrive souvent de ne retenir que l’illusoire et d’aller se faire foutre l’important.

Qui dit souvenir d’enfance, dit souvent souvenir de vacances. Et là ce qui me revient en tête c’est finalement la fois où je m’étais retrouvé dans un château en visite guidée avec une vraie bombe atomique ayant à peu près mon âge. C’était suffisamment rare pour être excessivement souligné. En général, ce genre d'activité sent plus la naphtaline que les bouffées d'oestrogènes.

Elle avait donc mon âge, une quinzaine d'années, l’âge où on a une tonne d’hormones en ébullition. L’âge où le désir sexuel n’a jamais été aussi grand, et les possibilités de l’assouvir aussi faibles.
Avec ses petites lunettes carrées, son tailleur noir, ses longs cheveux noirs, et ses jambes plus longues encore, elle ressemblait à ces jeunes lycéennes innocentes qu'on voit dans les Hentaï et moi je m’imaginais déjà en train de la prendre en levrette dans l'aile François 1er.
J’étais en nage, je commençais à suer comme un porc, c’était très gênant. Elle s’en était d’ailleurs aperçue et je ne savais plus trop où me mettre. Je commençais sérieusement à me durcir et une petite bosse dépassait de mon short, traduisant un certain état d’excitation. Ni une ni deux, réflexe de survie, je partis fissa aux toilettes me soulager un bon coup. Et je loupai une bonne partie de la visite.

J’en plaisante encore aujourd’hui mais à l’époque ça ne m’avait pas forcément fait rire, on était en pleine explication de l’assassinat du duc de Guise.

21 janvier 2010

AVIS

Hier je me suis pausé la question de savoir quelle était l'une des activités les plus minables, sales, glauques et moralement répréhensibles que je puisse faire en cachette sans que personne n'en sache jamais rien.
Après quelques secondes de mure réflexion, je me suis dit que se branler devant des photos de la soeur de son meilleur pote, c'était déjà pas mal... non ?

16 janvier 2010

PASSE, PRESENT, FUTUR

1

Je suis monté à Paris je ne sais plus trop comment. J’avais trouvé la porte du TGV ouverte alors je suis monté, ou presque.
L’odeur du sud qui suintait par les pores de cette gare crasseuse tentait au dernier moment de me retenir mais j’avais pris ma décision. De toute façon, j’avais pas trop le choix. C’était ça ou moisir au domicile parental.

A 25 ans, y’a de quoi avoir envie de partir.

Je regardais le quai s’éloigner par la vitre du premier étage et je ne pensais à rien. La vision semblait jaunie par un soleil d’été d’une intensité inutile. On aurait dit une image fanée.
Je laissais le paysage défiler de plus en plus vite sous mes yeux sans pouvoir le retenir. J’étais parti pour de bon et je m’en voulais presque d’avoir décidé ça aussi vite. C’était fini, plus rien à faire, aucun moyen de revenir en arrière. J’allais pouvoir vivre autre chose, si tant est que j’en eusse envie.

J’ai posé lentement ma tête contre le rebord de la fenêtre et j’ai fermé les yeux. Je n’ai même pas fait gaffe à qui était assis à côté de moi. J’en avais rien à faire, j’étais un peu tendu. Le stress du changement sans doute.
J’ai essayé de m’assoupir. 3 heures et demie de route, fallait devoir raccourcir le temps.

J’ai dormi tout le trajet, à mon grand étonnement, sans même me réveiller de temps en temps. Dès que le train s’est immobilisé j’ai laissé tout le monde sortir, je suis resté là, seul, immobile, le front entre les mains, noyé dans l'instant, sans pouvoir rien faire.
Une femme de ménage est entrée, ça m’a fait sursauter. Je me suis levé, j’ai pris mon sac et j’ai gagné la sortie.

La gare de Lyon était semblable à la mienne, en mieux. Des gens y couraient dans tous les sens et semblaient être furieusement en retard. J’ai esquivé tant que j’ai pu pour trouver un Escalator et je me suis dirigé vers le métro. La ligne était jaune, la 1 qu’on dit, la rame est arrivée avec aisance dans un gros bruit métallique. Je m’y suis engouffré en retenant inconsciemment mon souffle, pressé par d’autres voyageurs. Je devais avoir cet air qu’ont tous les nouveaux arrivants puisqu’ils m’ont capté tout de suite. J’hésitais à prendre place alors je me suis retrouvé debout. Ma tête dépassait de tout le monde, elle s’affichait à la vue générale. J’aimais pas trop ça, j’avais l’impression que si on avait eu des regards, on les aurait braqués sur moi en premier. J’ai baissé la tête pour cacher mon visage et j’ai serré la barre de fer aussi fort que possible.

Je devais aller à Auteuil. J’y suis arrivé comme prévu. Je connaissais pas le coin mais j’ai tout de suite compris que cet endroit ne serait pas pour moi.

C’était un immeuble haussmannien trop vieux dans un quartier trop cossu, coincé entre la Seine et un bois à putes où n’en trouve pas tant que ça parait il. L’appart n’était pas très spacieux, meublé de bric et de broc, et la concierge normalement exécrable, mais vu où c’était y’avait pas de quoi se plaindre.

Hank, mon nouveau coloc, était déjà là. C’est grâce à lui que j’avais pas eu à galérer pour me loger. Je l’avais connu à la fac et je traînais avec parce qu’il avait toujours des bons plans. Il avait dégotté cette piaule pour pas cher dans un quartier tout à fait inabordable. Plutôt pas mal comme démerdage. Je lui ai tapé la bise sur le palier et j’ai refermé soigneusement la porte derrière moi. Il m’a indiqué ma chambre, j’ai balancé mon sac à l’intérieur, puis je suis parti aux chiottes me taper une queue.


2

Je me suis réveillé à 11h, la bouche pâteuse, l’écume au bout des lèvres. J’avais bavé un peu sur mon oreiller. J’ai ouvert les volets, j’ai découvert une lumière déprimante et j’ai eu envie de me rendormir. Je me suis levé péniblement et j’ai crié un bon coup pour me sortir de ma torpeur.

Hank était déjà parti, il avait un entretien d’embauche je crois, enfin c’est ce qu’il m’avait dit. Tout ce dont j’étais sûr, c’est que j’en avais pas.
J’ai filé sous la douche et j’y suis resté une bonne heure sans prendre de bain. La baignoire était un peu crade mais je m’en foutais.
Je suis sorti de l’appart et j’ai cherché un coin où manger correctement. Je suis tombé sur un restau où on pouvait se poser au bar alors je me suis dit que c’était pas mal.
La serveuse envoyait du lourd. De longs cheveux blonds avec les yeux bleus qui vont avec, un corps des plus fins tout en ayant des seins prêts à exploser du débardeur, un jean bien moulant, j’arrivais pas à regarder ailleurs qu’en sa direction. Elle m’a servi mon plat avec un certain dédain alors ça m’a fait chier.
Je suis sorti sans prendre de café et j’ai pris une rue au hasard.

Je me suis retrouvé sur les quais de Seine sans m’en rendre compte. Les bateaux mouches fendaient les flots avec leur cohorte de touristes japonais bruyants et naïfs qui prenaient des photos de n’importe quoi. J’ai trouvé ça assez navrant et un peu touchant. J’ai continué mon chemin et je me suis retrouvé en face de la Maison de la Radio qui était encerclée de camions studio blancs. De dehors, on pouvait voir des gars qui bossaient dans leur bureau ou qui s’agitaient en discutant sûrement de quelque chose de très important avec leur collègue. J’ai commencé à avoir envie de pisser alors je suis rentré.


Deux jours plus tard, j’ai finalement eu un entretien moi aussi. Mais je l’avais pas préparé. Je me suis pointé à l’heure rue Boissy d’Anglas et je transpirais déjà comme un porc dans mon costard. J’ai sonné deux fois, on m’a répondu au bout de la troisième, puis j’ai pris place dans ce hall qui devait faire office de salle d’attente. La secrétaire faisait mine de pianoter quelque chose sur son Mac et je me demandais bien ce que ça pouvait être.
Au bout d’un quart d’heure un gars maigre et laid, aussi souriant qu’un croque mort, est venu me chercher. Son costume était gris et un peu trop grand mais surtout mal taillé. On aurait dit qu’on lui en avait prêté un à l’arrache. Je l’ai suivi jusqu’à son bureau sans dire un mot puis il m’a présenté une chaise qui ressemblait à rien.
« Alors comme ça vous voulez être assistant relations presse…
- Oui, que j’ai fais.
- Vous êtes en sûr ?
- Je crois oui.
- Et qu’est ce qui vous intéresse là dedans ?
- Tout. »

Je sais pas ce qui lui a pris, la semaine d’après j’étais à l’essai.


3

Pour mon premier jour je me suis pointé à l’avance, histoire de prendre le temps de m’installer. La secrétaire paraissait surprise de me voir, apparemment on l’avait pas prévenu qu'on m'avait embauché. Le boss était pas encore arrivé alors j’ai poiroté.
Un vieux magazine traînait dans un coin, je me suis mis à le feuilleter mais quand j’ai vu qu’il était encore plus périmé que ceux qu’on trouve chez le médecin j’ai laissé tombé. J’ai pensé que c’était bien regrettable comme situation et que si j’avais su j’aurais dormi un peu plus.
Le parquet craquait sous mes pas, comme tous ces vieux parquets qui servent à rien qu’à nous rappeler notre existence, alors je me suis mis à faire du bruit en appuyant plus ou moins fort dessus avec mes chaussures. La secrétaire faisait semblant de pas entendre. Elle allait commencer à s’irriter quand le chef s’est pointé.
Elle lui a fait un grand sourire comme si elle avait zappé ce qui venait de se passer. Le sourire bright, émail diamant, comme on voit à la télé, exactement pareil. Ça m’a scié, ça sonnait faux et pourtant ça plaît toujours ce genre de truc. Ça doit être très « corporate » je crois.
Elle lui a rendu son bonjour puis lui a dit « Votre nouvelle recrue est là » de façon très plate. Le gars s’est retourné puis a mis quelques instants à me resituer, ça se voyait dans ses yeux.

Il m’a pris par l’épaule comme pour être plus familier puis m’a présenté aux autres collaborateurs qui semblaient être aussi étonnés les uns que les autres de ma présence. On m’a mis dans un open space où il restait un bureau de libre et je me suis assis à ma place avec application. Le bureau imitation bois faisait moderne et large. J’avais de la chance, mon ordi avait un écran plat et le tapis de souris était unicolore.

Le boss s’est barré, j’ai respiré un bon coup, j’ai passé la main dans mes cheveux puis j’ai regardé autour de moi. Les trois autres personnes qui travaillaient là avaient déjà la tête rabaissée et faisaient mine de bosser avec un incroyable sérieux.

Mon job consistait à appeler des sociétés que je connaissais pas pour leur proposer des services que je ne connaissais beaucoup plus non plus. Je me prenais des vents à longueur de journée. Tout ce qu’on me répondait c’était « On est très petit on a pas besoin de relations presse » ou « On est chez quelqu’un d’autre ».
Le côté médias de la boite m’avait attiré mais on m’avait pas dit que j’allais faire du démarchage par téléphone à longueur de journée. Je m’étais fait entuber. C’était pas mon truc, c’était même un truc ce que je détestais. Je balançais du discours commercial à 2 balles mais il m’arrivait quand même de me perdre dans mes paroles. Les autres faisaient pas beaucoup mieux que moi mais eux au moins ils connaissaient leur texte.
Au bout d’une semaine j’en avais déjà assez, j’ai commencé à être plus vindicatif voir carrément insolent quand j'appelais. Je raccrochais directement au nez des gens si je supportais pas le ton qu’ils prenaient.
Mes collègues, ça les a un peu sidérés. Eux ils avaient accepté leur sort depuis longtemps sans broncher, il s’en prenaient souvent plein la gueule et s’excusaient presque quand ils se faisaient insulter. C’étaient des masos, on aurait dit qu’ils en redemandaient. Eh ben pas moi. Moi j’attendais que le moment où on allait enfin me virer.

J’ai dû attendre un bon mois mais j’y suis enfin arrivé. Je suis parti sans leur dire au revoir, et sans me retourner. Eux non plus d’ailleurs.

On m’a souvent dit que j’étais un connard qui s’ignore.
La seule valeur que j'ai, c'est une montre avec un prix odieux.

14 janvier 2010

ECRIRE

Hier je me suis cru écrivain. J'ai même écrit une nouvelle de 3 pages pour le prouver.
Ça sent le copier/coller mais si vous êtes intéressés faites moi sonner.

12 janvier 2010

BEAU OU RICHE

Tout à l'heure, j'étais sur facebook quand une bannière publicitaire a soudainement attiré mon attention : " Apprenez Exactement comment aborder les femmes et Éviter D'Être Rejeté, Même Si Vous N'Êtes pas beau ou riche. "

J'ai eu envie de défoncer mon écran d'ordinateur, là, prostré dans la froideur de cette chambre trop grise.
Mais la vision des 1000€ que j'allais devoir débourser pour m'en payer un autre a suffi à me stopper net. Je ne sais pas trop pour la beauté, alors 1000€ ça sera toujours un pas de plus vers la richesse.

Le 20ème siècle a été celui du totalitarisme: le 21ème sera t il celui du cynisme ?

9 janvier 2010

LE COMMENCEMENT DE LA FIN

Ce soir, je sais qu'il est déjà trop tard, l'insomnie me guette et semble s'être définitivement emparée de moi. Alors je vais vous parler de cette fille, mi démon mi déesse, et attendre que mon trouble cesse.

Je trouvais la fille gentille, son visage plutôt navrant, mais son corps et son coeur tout à fait charmants. Elle avait 10 ans de plus que moi et m’avait invité comme ça à dîner, comme si de rien était, et moi et mes 19 ans nous pensions comprendre où elle voulait en venir sans vraiment en être certains.

Je rentrai chez elle, appartement simple mais cossu d'un immeuble sans nom, et elle m’avait préparé un repas conforme à son image : passable sur la forme, incroyable sur le fond.

Les conversations d’usages et le dessert expédiés, il y eu tout à coup de longues secondes de silence, d’un silence presque assourdissant, semblable aux malaises que laissent les blancs lors des discussions entre gens de bonne compagnie, et je restais là, ne sachant pas trop quoi faire, tiraillé par l'anéantissement du moindre faux mouvement. Elle me prit finalement la main et je partis au quart de tour : embrassade empressée sur son canapé, étreinte avortée dans l’escalier puis aller simple vers sa chambrée.

Je faillis lui arracher chacun de ses vêtements tellement j’avais hâte de lui enlever toutes ces étoffes qui séparaient son corps du mien, mais j’arrivai enfin avec soulagement à l’origine du monde et c'était bien là l'essentiel.

Je ressentis quelque chose d'étrange : l’excitation de la première fois mêlée au vide d’être avec quelqu’un que l’on désire sans aimer. J’eu le sentiment qu’elle avait visiblement apprécié alors je regagnai mon domicile à la fois rassuré et en même temps désabusé d’avoir attendu si longtemps pour en arriver à ça.

Je ne savais pas quelles étaient ses intentions, je crois les mêmes que les miennes, en tout cas nous avons gardé contact même si je ne suis plus jamais revenu chez elle.

5 janvier 2010

MELISSA

Aller je vais vous parler de Melissa.
Melissa, c’était la première fille qui avait voulu sortir avec moi, c’était aussi accessoirement la plus belle fille de l’école. Mais quand on a 9 ans et qu'on ne sait pas forcément très bien ce que c’est que de sortir avec quelqu’un, on flippe surtout sa race devant « la peur de l’inconnue ».
Je lui avais donc dit non, bien qu’au fond de moi j’aurais eu envie de lui hurler oui, mais cela n’avait pas dû la déranger plus que ça puisque par la suite, consciente de l’attrait prononcé qu’elle suscitait chez la gent masculine, elle s'était essayée à presque tous les mecs « à peu près potables » du coin.
C’était ça Melissa, la plus belle de toutes, qui le savait, et qui avait enchaîné copain sur copain sans s'arrêter pratiquement jusqu'à la fin du lycée. Je n’avais donc été que le premier d’une longue liste sans logique, sans but ni fondement, d’une longue liste établie au hasard des rencontres, à l’aléa de l'existence.

Melissa, c’était aussi la première fille qui hante vos nuits et vos jours, qui vous pourrie la tête par sa beauté jusqu’à n’en plus finir. La fille pour laquelle vous maudissez le sort de continuer à ressentir encore quelque chose des années et des années plus tard.
Melissa, c’est aussi la fille qui reste au village, et qui un jour, on ne sait pas comment, se retrouve avec 15 kilos de plus, des yeux tout globuleux à force d'avoir trop bu, et des dents toutes jaunes à force d’avoir trop fumé.

Melissa, c’est la fille dont la laideur nouvelle signifie la fin de l'adolescence, la fin de l'innocence.

Melissa, c’est la fille avec qui je peux désormais discuter comme ça, de tout et de rien, comme si de rien était, sans en avoir rien à foutre, sans aucune tension d’où qu’elle vienne. Hormis peut être un peu de dégoût.

Dire qu’avant je n’arrivais pas à lui bégayer plus de deux mots.


"Car j'ignore où tu fuis,
Tu ne sais où je vais,
Ô toi que j'eusse aimée,
Ô toi qui le savais"

3 janvier 2010

HURLER

"Donnons nous corps et âmes, sans jamais croire que tout a un prix"

1 janvier 2010

En se disant que de toute façon 2010 sera toujours supérieur à 2009...