7 octobre 2013

LAVAPIES

Après la Chine, l'Espagne. Rester plus d'un mois à Paris relève en effet le plus souvent de la torture. Jamais une ville ne peut autant t'étouffer ou te faire sentir seul. Une atmosphère unique où la beauté des lieux semble compensée par le cynisme des personnes qui s'y sont perdu. Pourtant Paris est belle. Belle comme un peinture de maitre, belle comme une voiture de collection, belle comme un mannequin qui t'attire et se révèle cependant froide et vide à l'intérieur.

Entre le temps maussade, les filles qui baissent les yeux, et les automobilistes qui en viennent aux mains pour un feu grillé, prendre un peu de bon temps au soleil relève presque de l'instinct de survie.

Pierre m'accueille dans son tout nouvel appart à deux pas de la Puerta del Sol. Il m'a laissé la chambre nuptiale. Faut dire que la dernière fois, cantonné dans le salon sa copine n'avait pas trop apprécié que je ramène une 'locale' et j'avais été stoppé net en plein effort. Heureusement cette fois-ci les conditions sont meilleures avec une chambre en plus et une copine en moins. Bien sûr officiellement je n'ai rien à voir avec une fille qui lui a fait la vie pendant 2 ans pour partir avec le premier prof de salsa venu. Parfois "la chance n'a rien à voir dans rien".

J'ai revu maria. Parce que c'était dans l'ordre des choses, parce qu'il le fallait, parce que j'aime finir ce que j'ai commencé.

J’avais encore du mal à me remettre de tous les « avions » croisés en ce début de soirée quand je l’ai vue, appuyée contre un coin de porte, perchée sur le rebord de la rue, les lèvres pincées jusqu’au sang et le regard dans le vague. Elle portait un sac à main en skaï rouge usé à chaque extrémité et checkait nerveusement son iPhone comme si elle attendait un appel de détresse. Malheureusement pour elle le salut n'est pas venu pas du ciel, ni de la téléphonie, ni de tout autre moyen de communication et elle a fini par ranger soigneusement son appareil à mon arrivée.

Je ne savais pas où aller, ce n’était pas ma ville, et je n’avais pourtant fait aucun effort pour me renseigner. Je l’ai donc suivie dans un bar étrange aux murs couverts de pochettes de 45t des années 50 et dans lequel le service était assuré par des Drag Queen un peu sur le retour. L’endroit singulier se portait finalement bien à une discussion bizarre où l’anglais se mélangeait anormalement à un espagnol plus qu’hésitant. Je n’étais pas spécialement à l’aise avec elle, ni avec aucune autre personne d’ailleurs, ma difficulté à communiquer faisant péniblement ressortir un côté timide que je tentais jusque-là de cacher comme on cache une maladie honteuse.

Heureusement pour moi la chlamydia ne s’étant pas encore manifestée, cela me conforta dans l’idée de la ramener à l’appart comme nous en avions implicitement convenu. L’évidence de cette fin de soirée me faisant amèrement réaliser que décidément non, on était pas à Paris.

Je la déshabillais lentement contre le lit mais au fur et à mesure que les habits tombaient elle perdait confiance alors que la mienne se renforçait. Dans la lumière criarde d’une chambre trop grande et trop moderne elle n’était pas aussi belle que ce que j’avais imaginé et des images de filles à la plastique parfaite croisées dans la rue me revinrent en mémoire. J’étais un peu déconcerté, son visage et ses muscles se tétanisaient mais je ne faillis pas. Je me dis que j’avais finalement souvent couché avec des filles que je n'aimais pas mais que c’était probablement la seule solution pour m’envoyer en l’air à une fréquence raisonnable.
Voilà à quoi on en est réduit.

Elle semblait s’en vouloir d’avoir tremblé mais je ne lui en voulais pas, comment aurais-je pu.
Le lendemain elle m'a relancé. J'ai dit que j'étais occupé.

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