10 février 2010

INTERFERENCES

Marre des discussions pour rien, de ce vide ambiant, de ce non sens courant. Je prends tout à coup conscience, à mon grand étonnement, du formidable ennui des conversations convenues. Une claque en pleine gueule, un éclair de lucidité sûrement.

En fait on est tous des putains de trouillards des mots. OU des putains de trouillards tout court. Les premières choses sur lesquelles on parle sont souvent les mêmes, le boulot, d'où on vient, le pote qu'on a en commun, à la limite (touche suprême d'originalité) la dernière vidéo marrante sur youtube, etc... Puis quand le stock est épuisé, interférences, problème de connection, parasites, rupture de faisceaux. Rideau, circulez y'a rien à voir. On sèche. La page blanche. On sait plus quoi dire alors on est là comme un con, à bredouiller 2 mots inaudibles tout en baissant la tête, et on essaye comme on peut de passer à autre chose afin de faire cesser au plus vite ce léger sentiment de mal à l'aise.
Alors on zappe, aussi sec, sans même savoir à qui on a eu affaire.

On dirait qu'on joue tous au jeu du "comment parler le plus en t'en disant le moins". On flippe tous tellement sa race de dire vraiment ce qu'on pense, ce qu'on est, ce qu'on a au fond de soi, qu'on excelle dans la langue de bois. Comme des putains de politiques. Voilà c'est ça qu'on est devenus, des putains de politiques. Ce bal de la flippe et de l'image zéro défauts qu'on s'inflige m'exaspère. On avance tous masqués, on s'épie, on s'observe, on se croirait à Venise. Sauf qu'on enfile tous le même déguisement grisâtre qu'on semble prendre pour une belle armure bien épaisse, bien protectrice, bien brillante, et qu'un beau jour on se demande depuis quand on porte ces vêtements ternes et dégueulasses.
On est tous devenus lisses, sans reliefs, on s'est vidé peu à peu de notre substance pour ressembler à des coquilles vides sans même s'être gavé de prime-time à la sauce TF1.
Pas besoin de perfectionner les techniques de clonage, on s'est déjà cloné nous même.

Ainsi chaque parole un peu profonde qu'il nous arrive d'entendre devient presque parole d'évangile, miracle permanent. Et les rencontres relèvent finalement la plupart du temps du mirage : on a les personnes en face de soi, on peut presque les toucher, puis elles s'évanouissent dans l'oubli comme dans un mauvais rêve.


J'aurais eu envie de te connaître mais tu ne m'en as pas laissé le temps. Tu as fait comme tout le monde, c'est à dire rien. Que dalle à base de mots. J'en étais bien désolé et tu ne t'en es même pas rendu compte.


Je tombe de moins en moins amoureux, mais je commence à comprendre pourquoi.

4 commentaires:

  1. Regarde la bouteille à moitié pleine : a contrario, quand un vrai dialogue s'instaurera, à base d'échange, de maïeutique réelle, tu n'auras plus de questions à te poser, tu SAURAS.

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  2. Mais comme je suis à la bourre là, ça fait flipper!

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  3. Toujours le même processus, on change soi-même, et on finit un jour par faire les rencontres qui nous correspondent. Patience donc ; ça va arriver ;o)

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  4. Le silence fait parfois tellement de bruit qu'on cherche à le faire taire en remplissant l'air de mots vides... N'importe quoi, pour ne pas que l'autre entende ce qui hurle à l'intérieur de soi... Votre billet m'a touchée...

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